Dépôt de 2 textes visant à instaurer une obligation de casier judiciaire vierge pour tous les candidats aux élections nationales et locales !
A retrouver sur le site du Sénat :
http://www.senat.fr/leg/ppl16-046.html
http://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl16-045.html
***
Mesdames, Messieurs,
Notre pays et ses institutions souffrent aujourd’hui d’un contexte inédit de défiance des citoyens envers les partis traditionnels et les élus en général. Cette baisse de confiance atteint directement les conditions du débat démocratique, en induisant, de manière pernicieuse, l’idée que la démocratie devient un gadget politique.
Ce désenchantement prend terreau dans la croyance que la République échapperait à ceux qui en sont pourtant les principaux acteurs, les citoyens. Il croît à la faveur des scandales politico-financiers qui sèment le doute et agitent notre pays, et prospère du fait de certains dysfonctionnements, qui laissent des élus condamnés occuper l’espace démocratique et se représenter. Ces scandales laissent accroire que la corruption serait une pratique générale des élus !
Les auteurs de cette proposition de loi tiennent à rappeler que la corruption est loin d’être une pratique généralisée. Le malaise démocratique que connaît notre pays ne constitue pas une fatalité à laquelle nous devons nous résoudre, à condition d’y mettre les moyens de la restauration du lien de confiance entre les citoyens et les élus.
*
Non-cumul des mandats, création de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique, publication des déclarations d’intérêts et de patrimoine des élus, contrôle du « pantouflage » des hauts fonctionnaires, etc. : le quinquennat qui touche bientôt à sa fin a pourtant vu de nombreuses avancées en matière de transparence et de lutte contre la corruption.
Près de neuf textes de lois discutés et adoptés par le Parlement ont permis de préciser la notion de conflits d’intérêts et d’appliquer une méthodologie éthique novatrice à l’ensemble du secteur public, du garde des Sceaux et des magistrats du ministère public, au procureur de la République financier, en passant par les magistrats de l’ordre judiciaire
Les scandales récents qui ont secoué la vie politique nationale sont ainsi à la fois une preuve de la réussite de telles mesures. La révélation de ces affaires apparaît, en effet, comme le résultat de l’amplification de la lutte pour la moralisation de la vie publique.
Mais ils sont également un aiguillon devant nous pousser à aller plus loin dans la moralisation de la vie politique. Il est devenu intolérable à nos concitoyens de voir que certains élus ont été maintes et maintes fois condamnés, sans que cela ne les empêche de se présenter et d’être élus responsables politiques.
En cette matière, le rapport annuel 2013 du Service central de prévention de la corruption rappelle ainsi que « les effets de sensibilité priment sur les données statistiques ». Amplifiées par les médias à l’occasion de certaines affaires retentissantes, les atteintes à la probité impliquant des élus ou des fonctionnaires tendent, par un effet de contagion regrettable, à ternir l’image et à affecter la crédibilité de l’ensemble des responsables politiques, y compris locaux.
Selon l’enquête « Fractures Françaises – 2014 – vague 2 » réalisée du 8 au 14 janvier 2014 par l’Institut Ipsos/Steria103, 65 % des personnes interrogées (+ 3 % par rapport à 2013) jugent que « la plupart des hommes et des femmes politiques sont corrompus» et 84 % (+ 2) qu’ils « agissent principalement pour leurs intérêts personnels ».
Par contraste, en 1993, alors que de nombreuses affaires mettant en cause la probité d’élus avaient déjà été révélées au public, seules 39% des personnes interrogées estimaient que les politiques constituaient « un milieu malhonnête ».
À cet effet de « sensibilité », il convient aussi d’ajouter que la conscience de ces difficultés par les citoyens a évolué. Les citoyens ne comprennent plus le « deux poids-deux mesures » appliqué à ses responsables politiques.
*
C’est la raison pour laquelle pour en finir avec le leitmotiv « tous pourris », le présent texte propose une mesure concrète, mais simple, propre à rétablir les conditions de la confiance des citoyens en leurs représentants : les candidats à une élection législative ou sénatoriale devront présenter un casier judiciaire vierge (extrait B2, qui concerne les crimes et les délits), de la même façon que tous les candidats à un concours de la fonction publique.
La probité deviendrait ainsi un des critères d’éligibilité de ceux qui ont pour mission, du fait de leur mandat, de représenter les citoyens. Appliquée à de nombreuses professions, cette obligation se verrait étendue aux mandats électifs de manière générale. Nous ne pouvons plus laisser prospérer de doutes sur l’intégrité des responsables publics. La collectivité publique a le droit et le devoir de contrôler la probité de ses responsables, tout comme elle en contrôle désormais l’enrichissement.
Il s’agit également de préciser que cette mesure de bon sens, qui est de nature préventive et non plus réactive, a d’ores et déjà été proposée par le Service central de prévention de la corruption, dans son rapport annuel de 2013 précédemment cité.
*
L’article 1er de cette proposition de loi organique a pour objet d’ajouter une nouvelle condition d’inéligibilité pour l’élection présidentielle. Désormais pour se porter candidat à cette élection fondamentale pour notre démocratie, le Conseil constitutionnel vérifiera que le bulletin n° 2 du casier judiciaire soit exempt de condamnation incompatible avec l’exercice d’un mandat électif.
L’article 2 insère un nouvel article L.O. 127 dans le code électoral, ayant pour objet d’ajouter une nouvelle condition d’inéligibilité pour les élections législatives et partant pour les élections sénatoriales, en vertu de l’article L.O. 296. Désormais pour se porter candidat, il sera exigé que le bulletin n° 2 du casier judiciaire soit exempt de condamnation incompatible avec l’exercice d’un mandat électif.
Il convient de préciser que cette mesure n’a pas un caractère perpétuel, puisque des règles précises existent d’ores et déjà sur l’effacement, à la demande ou automatique, du casier judiciaire.
L’article 3 prévoit les modalités d’entrée en vigueur dans le temps de cette disposition.
*
Les auteurs de cette proposition de loi croient et réaffirment fermement que notre démocratie a besoin d’un changement de paradigme radical. Faire de la politique autrement tout comme faire la politique autrement passent par le combat contre des pratiques anciennes dommageables installées dans le paysage politique, à rebours des intérêts de ce monde politique.
Add A Comment