Débat sur le défi de la sauvegarde et de la valorisation de la filière élevage !
Je suis intervenu, le 23 novembre, sur la sauvegarde et la valorisation de la filière de l’élevage. Retrouvez mon intervention, prononcée dans l’hémicycle du Sénat, ci-dessous :
Débat sur l’élevage
Madame la Présidente,
Monsieur le Ministre,
Mes chers collègues,
Ces dernières années n’ont pas épargné l’agriculture française, fortement éprouvée par les aléas économiques, et les désastres climatiques et sanitaires. L’élevage est particulièrement touché. Chaque année, 10 000 agriculteurs, principalement des éleveurs, renoncent à exercer leur profession. Je viens d’apprendre la vente de la dernière vache d’un couple d’éleveur du Tarn-et-Garonne que j’avais rencontré cet été. Les éleveurs sont déboussolés et multiplient les démonstrations de colère. Et je ne peux que les comprendre !
Et pourtant, sous ce quinquennat, nous le savons, l’agriculture a fait l’objet d’un déploiement sans précédent de moyens financiers et juridiques. Différents plans d’aides à l’élevage ont été mis en œuvre. Le budget 2016 a consacré 1 milliard d’euros d’aides pour l’élevage. En 3 ans, les aides européennes et nationales auront été revalorisées de 60%.
En octobre dernier : le Gouvernement a présenté un pacte de consolidation et de refinancement des exploitations agricoles.
Au total, les allègements de charges sociales et fiscales issus du pacte de responsabilité et du CICE auront atteint 1,7 milliards d’euros en 2017. A ces allégements s’ajoutent les réductions de cotisations des exploitants agricoles qui équivalent à 10 points de cotisations sociales depuis 2015.
Ces plans ne répondent qu’en partie à l’urgence de la situation. Alors, que faire au-delà de l’urgence ?
La Politique Agricole Commune n’assume absolument plus le rôle qui était originellement le sien. La libéralisation effrénée de l’agriculture engagée par l’Union européenne est – sans exagération – une catastrophe. La fin des quotas laitiers, en avril 2015, a précipité les élevages français dans une concurrence mondiale dévoyée, monde sans loi, ou plutôt monde dans lequel la volatilité des cours des matières premières agricoles fait la loi. Résultat, les cours se sont effondrés : le lait est passé en France sous le seuil psychologique des 28 centimes le litre, soit bien au-dessous du coût de revient moyen des exploitations. 13.000 producteurs de lait français ont déposé un dossier pour bénéficier d’une aide européenne.
De son côté, la filière de la viande bovine a subi les conséquences de l’afflux massif de dizaines de milliers de carcasses de vaches laitières abattues pour tenter de réduire la surproduction laitière. Les cours ont encore perdu 16 % sur un an.
Ces constats qui sont partagés, nous les avions soulevés en avril dernier lors de la discussion de notre proposition de résolution avec Franck Montaugé. Des députés français ont également proposé début octobre la création d’un outil européen de régulation des prix du lait. Autre proposition de ces députés pour lutter contre la volatilité des prix : la mise en place de fonds de mutualisation, ou encore la réorientation des fonds européens par exemple en déployant les financements européens de la PAC vers des mécanismes assurantiels susceptibles d’intervenir dans les périodes de crise. Nos conclusions sont les mêmes. Et tel était l’objet de notre proposition de loi votée à l’unanimité par le Sénat en juin dernier.
Par ailleurs, si la filière de l’élevage rencontre des difficultés conjoncturelles, beaucoup sont aussi de nature structurelle, comme je le souligne souvent pour d’autres filières. Les bâtiments d’élevage sont pour la plupart vieillissants. Une modernisation serait indispensable, mais la sous-capitalisation des exploitations empêche les agriculteurs d’investir dans de nouveaux outils de production. Pour effectuer sa révolution, l’élevage a donc besoin d’une vraie stratégie de filière diversifiée ! Doit être privilégiée la production d’électricité par la méthanisation. Plusieurs propositions de bon sens ont été faites par le Gouvernement : l’amélioration du dispositif d’achat pour l’électricité produite à partir de biogaz en adaptant la prime d’effluents d’élevage à la réalité des projets de méthanisation agricole ; la poursuite de la mobilisation du fonds déchet de l’ADEME ; la mobilisation des appels à projets « structuration de filières » ; le financement de la recherche et du développement nécessaire pour constituer une offre française d’équipements performants.
Une autre réforme de taille est celle de la différenciation qualitative. Il faut tout d’abord privilégier les circuits courts ! L’avenir de l’élevage dépend ensuite de la capacité des professionnels à se différencier avec le lancement de leur propre marque à l’image de « Faire France, lait équitable » ou le « Lait du consommateur ». Sans que le coût final ne soit exorbitant pour le consommateur : entre 3,5 et 7 euros par an ! Ou alors, comme dans l’Hérault où le syndicat mixte de la filière viande a offert aux éleveurs, via la plateforme d’Agrilocal 34, une opportunité de vendre leur production. Une double initiative puisque cette action permet également de valoriser l’abattoir de Pézenas, seul abattoir public de notre région. Un effort particulier doit être fait concernant la restauration hors domicile : il faut un engagement fort des collectivités territoriales, mais aussi de la filière afin d’approvisionner la restauration scolaire.
A ce sujet, alors que la publication des vidéos de l’association L211 -en ce qui concerne l’abattoir de Pézenas avec des images obsolètes – a irrémédiablement entaché la réputation de ces derniers, je soutiens la démarche du ministre de l’agriculture qui vise à renforcer le dialogue national sur les questions de bien-être animal à l’abattoir. Il s’agit de responsabiliser les établissements qui font d’importants efforts en faveur de la transparence de leurs pratiques et de la formation du personnel.
Structurelles et conjoncturelles, locales, nationales et européennes, les mesures pour l’élevage doivent donc être déclinées rapidement et efficacement. Pour moi, l’agriculture française a un grand avenir devant elle. Face à notre grand défi, au-delà de la survie de nos paysans : assurer notre indépendance alimentaire.
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