PLF 2024 : Quel monde agricole aurons-nous ? Quel monde agricole voulons-nous ?

Demain quel monde agricole aurons-nous? 

Et aujourd’hui quel monde agricole voulons-nous? 

Pas de provocation. J’ai posé ces deux questions de façon sincère, lors de mon intervention en séance publique, dans le cadre du Projet de loi des finances pour 2024 :

C’est tout le sens des budgets et des lois que nous votons
dans nos hémicycles.
Et il y en a beaucoup… Elles se succèdent sur tous les fronts :
la loi d’avenir en 2015, les différentes lois egalim , la loi
Sempastous…

Et toujours les mêmes sujets qui reviennent avec des enjeux
transversaux qu’il faudra bien un jour travailler ensemble et
pas en silos comme on le fait systématiquement.

Mais quelle évaluation de nos politiques publiques ?
Quel impact de nos différentes lois ?

Le premier enjeu est bien celui de la souveraineté
alimentaire. On en parle dans tous nos débats.
Mais aujourd’hui il y a une réalité : nos dépendances,
l’importation, par exemple , de 30 % de la viande et un chiffre
fort: il n’y a plus que 400 000 agriculteurs dont 50% partiront
à la retraite d’ici 10 ans.

Cela pose donc le problème de l’attractivité du métier, de la
transmission des exploitations et du foncier.

Deuxième enjeu, l’environnement. Les changements
climatiques nous ont obligés à revoir nos modèles de
production. Les agriculteurs français ont su s’adapter. Hve,
agriculture raisonnée, bio…
Mais aujourd’hui, on le sait, dans un contexte d’inflation qui
réduit le pouvoir d’achat des français, dans un contexte géo
politique dramatique qui a eu des incidences sur certains
matériaux … le bio est vendu au prix du conventionnel.
Résultats: moins de conversion et même des déconversions…
Les crises se succèdent, sanitaires, climatiques… hier lors
d’un colloque sur le mal-être en agriculture il a même  été
question de la permacrise.

L’agro climatologue Serge ZAKA que j’ai rencontré
récemment propose un postulat : exit la monoculture.

Il faut pousser les agriculteurs à diversifier leurs productions
pour limiter les risques.
Il faut revoir nos modèles et nous adapter. Sans cesse.

Enfin il faut vraiment avancer sur les Paiements pour Services
Environnementaux.
On en parle, cela existe depuis des années mais la complexité
des critères est tel qu’en réalité les PSE restent confidentiels .
Pourtant je suis persuadé qu’ils sont la solution pour nos
agriculteurs qui au-delà de nous nourrir, maintiennent le cadre
de vie et favorisent le tourisme vert, permettent de maintenir
les espaces ouverts, luttant ainsi contre les incendies…

Troisième enjeu, l’économie.
Le prix n’est plus rémunérateur depuis des années.
Le juste prix n’existe pas et un travail avec le négoce, les
transformateurs et la GD doit être poursuivi.
S’opposer ne fera jamais avancer.

La lourdeur administrative fait perdre du temps aux
agriculteurs déjà épuisés. Pensons vraiment une simplification
non pas POUR eux mais PAR eux, AVEC eux.
Est-il si compliqué de simplifier vraiment ?
Exemple récent: un jeune a dû rembourser une partie de sa
DJA car, covid et inflation oblige, il n’a pas pu assumer son
plan d’investissement. Double peine ! Ne pourrait-il pas y
avoir un délai en fonction des aléas vécus ?

Concernant les accords internationaux, là encore il faut des
évolutions. Imposer des clause miroir car il est
scandaleux  que des produits rentrent en France sans avoir les
mêmes obligations. C’est quand même un minimum d’être
soumis aux mêmes règles..

Comment dans ce contexte annoncer des objectifs de
compétitivité ?
Le « En  même temps » ne fonctionne pas toujours …
Nous nous sommes réunis récemment  autour d’une
proposition de loi à ce sujet, mais la compétitivité ne se
décrète pas. Elle se construit à travers des mesures qui visent
l’équité et la loyauté sinon ce sera toujours un vœu pieux.

Enfin dernier enjeu, l’adaptation à l’évolution sociétale.
Notre agriculture doit correspondre aux évolutions des
consommateurs. Et donc du marché. Car ne l’oublions pas
nous sommes dans un marché libéral ou là encore il faut sans
cesse s’adapter.

Monsieur le Ministre, c’est pourquoi nous attendons avec
impatience la loi d’orientation agricole.
Pour être efficiente et qu’elle ne soit pas une loi de plus, il
faudra y aborder tous ces enjeux et les travailler ensemble. Ils
sont interdépendants. Pour l’instant, le texte annoncé ne les
aborde pas tous.

Monsieur le Ministre, votre budget est à la hauteur avec
un milliard. C’est la plus forte progression, il faut le
saluer. C’est pourquoi nous voterons POUR.
L’état doit être présent, montrer sa solidarité et lutter contre le
mal-être. Le programme AREA, par exemple, doit être
simplifié et amplifié pour les agriculteurs en difficulté .

Mais, sans langue de bois, il faut aussi que les organisations
professionnelles s’emparent de leur avenir.
Les syndicats souffrent d’un manque de représentativité avec
60% d’abstention aux élections. Il n’y a pas que le monde
politique qui est concerné ! Cela témoigne de la défiance à
tous les niveaux. La gravité de la situation oblige à la raison.
Les difficultés sont exacerbées par des causes conjoncturelles
mais elles s’enlisent et montrent un déficit structurel.
Il faut donc entamer un travail de fond qui brise le tabou des
clivages.
Demain quel monde agricole aurons-nous?
Et aujourd’hui quel monde agricole voulons-nous?
Unissons-nous pour apporter des réponses partagées.
Notre agriculture et nos agriculteurs le méritent.

 

Retrouvez mon intervention en vidéo en cliquant sur ce lien 

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